Bordeaux capitale de la France : du 14 juin au 1er juillet 1940
(coll admin)
En juin 40, Bordeaux est de nouveaux la capitale de la France. La première fois remonte à 1870 lors de la défaite à Sedan ; la seconde après la défaite de Charleroi en septembre 1914. La capitale girondine est alors très justement surnommée la « capitale tragique ». A la mi-juin, le nombre de réfugiés encombrant les routes, la gare Saint-Jean et le port est à la mesure de l’accélération des événements. La population bordelaise assiste à un raz-de-marée humain de près de 1,5 million d’hommes, de femmes et d’enfants qui va tenter de trouver refuge dans la région.
Le 14 juin, le cortège du gouvernement traverse un Pont de pierre embouteillé. La caravane ministérielle s’offre en spectacle aux nombreux bordelais et réfugiés qui remplissent les rues et les bâtiments officiels. Le président de la République Albert Lebrun élit domicile à l’Hôtel de la Préfecture, rue Vital Carles. Son voisin à l’Hôtel du Commandant de la XVIIIème région militaire n’est autre que le président du Conseil des Ministres et Ministre de la Défense Paul Reynaud.
Le Ministre de l’Intérieur Georges Mendel trouvera à loger avec son personnel à la Préfecture cours du Chapeau Rouge. Paul Baudouin, sous-secrétaire d’Etat aux Affaires Etrangères s’installe dans un premier temps au lycée de Longchamps. Le Ministère de la Justice de Monsieur Serol s’installe tout naturellement au Palais de Justice tandis que les autres personnages officiels, hauts fonctionnaires, sénateurs et députés et leur famille trouvent difficilement à s’installer dans des chambres d’hôtels réquisitionnées ainsi que des maisons particulières. Le maréchal Pétain quant à lui est logé à l’Hôtel Desbarrats en dehors du centre ville sur le boulevard Wilson en compagnie du Général Brecart. Enfin le Général de Gaulle loge au Majestic et c’est au Splendid où il trouve à prendre ses repas entre deux voyages à Londres qu’il saluera pour la dernière fois le Maréchal ; aucune parole ne fut échangée.
Tandis que l’armée allemande déferle sur la France et entre dans Paris ce même 14 juin 1940, le gouvernement tente de reprendre pied dans la tourmente.
Dans la nuit du 14 au 15 le GAL De Gaulle s’envole pour Londres afin d’obtenir des anglais de transporter en Afrique du Nord les troupes françaises non engagées et également rassurer les alliés sur le sort de la flotte française. De Gaulle agissant sur ordre de Paul Reynaud s’engage à ce que les navires français ne tombent pas entre les mains du futur occupant. Les Anglais acceptent ainsi le principe d’une union franco-britannique avec Parlement commun qui fait de chaque citoyen français un citoyen anglais et vice-versa. Cette idée, présentée le 16 juin en Conseil des Ministres à l’Hôtel de la Préfecture rue Vital Carles, a pour principe que chacun des deux pays s’interdit mutuellement de conclure un armistice ou une paix séparée.
Paul Reynaud hostile à l’armistice souhaite la capitulation de l’armée, ce qui est vivement écarté. Entre temps, l’Angleterre donnait son aval pour la négociation d’une paix séparée à condition de mettre à l’abri la flotte française. Paul Reynaud ne rencontre aucun appui au sein du gouvernement et présente pour la seconde fois en trois jours sa démission au président Albert Lebrun qui cette fois, devant l’urgence de prendre une décision pour le France, l’accepte.
Dans les graves circonstances que traverse le pays, le gouvernement est confié à une haute personnalité recueillant le respect unanime de la Nation : le Maréchal Pétain.
Quelle est la moins mauvaise des solutions ? Capitulation ou armistice ?
Rappelons que dans le premier cas l’armée qui capitule s’en remet à l’ennemi qui dispose de sa situation. Dans le second cas, le gouvernement négocie pas voie diplomatique les conditions de cessation des hostilités, pendant ce temps les combats continuent.
Au cours de la nuit, les événements se bousculent : Monsieur Baudouin, nommé Ministre des Affaires Etrangères dans le nouveau gouvernement, remet une note manuscrite à l’ambassadeur d’Espagne, Monsieur de Lequerica, pour entrer en contact avec les allemands et connaître les conditions d’un armistice. Le 17 juin à 9 heures le général de gaulle s’envolait de Mérignac pour l’Angleterre. Le 18 il lançait depuis Londres son célèbre appel invitant à poursuivre le combat.
Le 19 juin à 6h30 l’Ambassadeur espagnol remet au domicile personnel de Monsieur Baudouin rue Saint Genès la réponse du gouvernement allemand. Dès 9 heures, l’ensemble des Ministres se réunit autour du Président Lebrun pour désigner les plénipotentiaires qui iront à la rencontre des allemands pour connaître leurs conditions de cessation des hostilités. Devant l’ampleur de la tâche à accomplir dans les prochaines heures, le Ministère des Affaires Etrangères est transféré du lycée de Longchamps à la fac de droit place Pey-Berland.
Dans la nuit du 19 au 20 juin, aux alentours de minuit, douze bombardiers Heinkels He-111 du IV Fliegerkorps, basé à Dinand font leur apparition au dessus de Bordeaux larguant au hasard 61 bombes (88 au total dans l’agglomération), causant de nombreux dégâts matériels et humains : 63 morts (68 au total) et 185 blessés.
Le lendemain matin, le haut commandement de la Whermacht faisait savoir qu’il attendait la Délégation Française à partir de 17 heures près de Tours. La Délégation menée par le Général Huntziger, ancien chef d’Etat-major du Maréchal Foch, parvient non sans encombre au rendez-vous après un périple de 7 heurs. De l’autre côté de la Loire, ils sont accueillis par les allemands qui les conduisent fort courtoisement à Paris où ils passent la nuit, puis à Compiègne où ils sont attendus sur les lieux mêmes de l’armistice de 1918 ( !). Entre le moment où le chancelier du Reich Adolf Hitler arrive en voiture, passe en revu la compagnie d’honneur, monte dans le wagon suivi par les plénipotentiaires français, la lecture en allemand du préambule des conditions de l’armistice puis sa traduction, le salut individuel de chaque représentant du gouvernement français et son départ, il ne se sera pas passé plus de 12 minutes. 12 minutes lourdes de conséquences qui vont engager le pays pour plusieurs années… nous sommes le 21 juin 1940, il est 15h42.
L’armistice, paraphé par le général Huntziger et le Generaloberst Keitel, est ratifié le 22 juin à 18h36. Pourtant la guerre n’est pas finie puisque aucun armistice n’est signé avec les Italiens, alliés de l’Allemagne. Le gouvernement français fait remarquer qu’il n’est pas question d’armistice avec l’Italie puisque cette dernière n’a remporté aucun succès militaire notable. Un accord est trouvé et signé à 19h15 le 24 juin ce qui a pour conséquence immédiate d’annoncer la fin des combats 6 heures après, comme le stipulait les exigences allemandes. Le mardi 25 juin à 0h35, est officiellement le premier jour de la fin des hostilités. Cette journée, décrétée deuil national dans tout le pays, est pour les Bordelais le premier contact avec le vainqueur.
(coll admin)
En juin 40, Bordeaux est de nouveaux la capitale de la France. La première fois remonte à 1870 lors de la défaite à Sedan ; la seconde après la défaite de Charleroi en septembre 1914. La capitale girondine est alors très justement surnommée la « capitale tragique ». A la mi-juin, le nombre de réfugiés encombrant les routes, la gare Saint-Jean et le port est à la mesure de l’accélération des événements. La population bordelaise assiste à un raz-de-marée humain de près de 1,5 million d’hommes, de femmes et d’enfants qui va tenter de trouver refuge dans la région.
Le 14 juin, le cortège du gouvernement traverse un Pont de pierre embouteillé. La caravane ministérielle s’offre en spectacle aux nombreux bordelais et réfugiés qui remplissent les rues et les bâtiments officiels. Le président de la République Albert Lebrun élit domicile à l’Hôtel de la Préfecture, rue Vital Carles. Son voisin à l’Hôtel du Commandant de la XVIIIème région militaire n’est autre que le président du Conseil des Ministres et Ministre de la Défense Paul Reynaud.
Le Ministre de l’Intérieur Georges Mendel trouvera à loger avec son personnel à la Préfecture cours du Chapeau Rouge. Paul Baudouin, sous-secrétaire d’Etat aux Affaires Etrangères s’installe dans un premier temps au lycée de Longchamps. Le Ministère de la Justice de Monsieur Serol s’installe tout naturellement au Palais de Justice tandis que les autres personnages officiels, hauts fonctionnaires, sénateurs et députés et leur famille trouvent difficilement à s’installer dans des chambres d’hôtels réquisitionnées ainsi que des maisons particulières. Le maréchal Pétain quant à lui est logé à l’Hôtel Desbarrats en dehors du centre ville sur le boulevard Wilson en compagnie du Général Brecart. Enfin le Général de Gaulle loge au Majestic et c’est au Splendid où il trouve à prendre ses repas entre deux voyages à Londres qu’il saluera pour la dernière fois le Maréchal ; aucune parole ne fut échangée.
Tandis que l’armée allemande déferle sur la France et entre dans Paris ce même 14 juin 1940, le gouvernement tente de reprendre pied dans la tourmente.
Dans la nuit du 14 au 15 le GAL De Gaulle s’envole pour Londres afin d’obtenir des anglais de transporter en Afrique du Nord les troupes françaises non engagées et également rassurer les alliés sur le sort de la flotte française. De Gaulle agissant sur ordre de Paul Reynaud s’engage à ce que les navires français ne tombent pas entre les mains du futur occupant. Les Anglais acceptent ainsi le principe d’une union franco-britannique avec Parlement commun qui fait de chaque citoyen français un citoyen anglais et vice-versa. Cette idée, présentée le 16 juin en Conseil des Ministres à l’Hôtel de la Préfecture rue Vital Carles, a pour principe que chacun des deux pays s’interdit mutuellement de conclure un armistice ou une paix séparée.
Paul Reynaud hostile à l’armistice souhaite la capitulation de l’armée, ce qui est vivement écarté. Entre temps, l’Angleterre donnait son aval pour la négociation d’une paix séparée à condition de mettre à l’abri la flotte française. Paul Reynaud ne rencontre aucun appui au sein du gouvernement et présente pour la seconde fois en trois jours sa démission au président Albert Lebrun qui cette fois, devant l’urgence de prendre une décision pour le France, l’accepte.
Dans les graves circonstances que traverse le pays, le gouvernement est confié à une haute personnalité recueillant le respect unanime de la Nation : le Maréchal Pétain.
Quelle est la moins mauvaise des solutions ? Capitulation ou armistice ?
Rappelons que dans le premier cas l’armée qui capitule s’en remet à l’ennemi qui dispose de sa situation. Dans le second cas, le gouvernement négocie pas voie diplomatique les conditions de cessation des hostilités, pendant ce temps les combats continuent.
Au cours de la nuit, les événements se bousculent : Monsieur Baudouin, nommé Ministre des Affaires Etrangères dans le nouveau gouvernement, remet une note manuscrite à l’ambassadeur d’Espagne, Monsieur de Lequerica, pour entrer en contact avec les allemands et connaître les conditions d’un armistice. Le 17 juin à 9 heures le général de gaulle s’envolait de Mérignac pour l’Angleterre. Le 18 il lançait depuis Londres son célèbre appel invitant à poursuivre le combat.
Le 19 juin à 6h30 l’Ambassadeur espagnol remet au domicile personnel de Monsieur Baudouin rue Saint Genès la réponse du gouvernement allemand. Dès 9 heures, l’ensemble des Ministres se réunit autour du Président Lebrun pour désigner les plénipotentiaires qui iront à la rencontre des allemands pour connaître leurs conditions de cessation des hostilités. Devant l’ampleur de la tâche à accomplir dans les prochaines heures, le Ministère des Affaires Etrangères est transféré du lycée de Longchamps à la fac de droit place Pey-Berland.
Dans la nuit du 19 au 20 juin, aux alentours de minuit, douze bombardiers Heinkels He-111 du IV Fliegerkorps, basé à Dinand font leur apparition au dessus de Bordeaux larguant au hasard 61 bombes (88 au total dans l’agglomération), causant de nombreux dégâts matériels et humains : 63 morts (68 au total) et 185 blessés.
Le lendemain matin, le haut commandement de la Whermacht faisait savoir qu’il attendait la Délégation Française à partir de 17 heures près de Tours. La Délégation menée par le Général Huntziger, ancien chef d’Etat-major du Maréchal Foch, parvient non sans encombre au rendez-vous après un périple de 7 heurs. De l’autre côté de la Loire, ils sont accueillis par les allemands qui les conduisent fort courtoisement à Paris où ils passent la nuit, puis à Compiègne où ils sont attendus sur les lieux mêmes de l’armistice de 1918 ( !). Entre le moment où le chancelier du Reich Adolf Hitler arrive en voiture, passe en revu la compagnie d’honneur, monte dans le wagon suivi par les plénipotentiaires français, la lecture en allemand du préambule des conditions de l’armistice puis sa traduction, le salut individuel de chaque représentant du gouvernement français et son départ, il ne se sera pas passé plus de 12 minutes. 12 minutes lourdes de conséquences qui vont engager le pays pour plusieurs années… nous sommes le 21 juin 1940, il est 15h42.
L’armistice, paraphé par le général Huntziger et le Generaloberst Keitel, est ratifié le 22 juin à 18h36. Pourtant la guerre n’est pas finie puisque aucun armistice n’est signé avec les Italiens, alliés de l’Allemagne. Le gouvernement français fait remarquer qu’il n’est pas question d’armistice avec l’Italie puisque cette dernière n’a remporté aucun succès militaire notable. Un accord est trouvé et signé à 19h15 le 24 juin ce qui a pour conséquence immédiate d’annoncer la fin des combats 6 heures après, comme le stipulait les exigences allemandes. Le mardi 25 juin à 0h35, est officiellement le premier jour de la fin des hostilités. Cette journée, décrétée deuil national dans tout le pays, est pour les Bordelais le premier contact avec le vainqueur.